Bibliographie

 

La bibliographie moderne consacrée à George Onslow était encore récemment réduite à un seul et unique ouvrage édité en 1985 par Christiana Nobach chez Bärenreiter, et à une thèse publiée en 1981 aux États-Unis, mais non diffusée : ces deux écrits n'ont jamais été traduits. Auparavant, il faut remonter en 1889, date à laquelle furent écrits, la même année, deux monographies consacrées au compositeur : l'une publiée à Paris, l'autre à Clermont-Ferrand. Depuis, et profitant du petit événement commémoratif qu'a constitué le 150e anniversaire de la disparition d'Onslow, deux autres livres sont parus simultanément en France - la première biographie complète et un essai.

Nous nous proposons de présenter ces ouvrages, en nous attardant tout particulièrement sur l'ouvrage de référence paru sous la plume de Baudime Jam.

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Un grand homme en province :
George Onslow, l'homme et le musicien.

par Cirice Teillard
(Téqui, Paris, 1889)

L'auteur de ce petit fascicule de 62 pages était ingénieur de sa profession. Ainsi qu'il l'indique dans son avant-propos, c'est à la requête de l'Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Clermont qu'il rédigea cette monographie : à l'époque, on était en 1884, le centenaire de la naissance d'Onslow était déjà passé inaperçu et son nom, en Auvergne, "ne rappelait rien de plus que le souvenir d'un châtelain justement considéré, estimé de ses voisins pour sa générosité et l'affabilité de ses manières." Cirice Teillard est donc le premier auteur à s'être penché sérieusement sur la vie d'Onslow en effectuant des recherches dans les archives familiales qui constituent le noyau de son ouvrage : la correspondance surtout, mais également la lecture des nécrologies d'Halévy et du comte de Murat, lui ont permis de retracer sommairement la carrière de ce "véritable maître de la musique".
Bien écrit et toujours vivant, ce récit constitue une bonne introduction à la connaissance d'Onslow, en dépit de sa brièveté. On appréciera l'intelligence et l'habileté avec lesquelles Teillard utilise le peu de sources dont il dispose : loin de toute compilation, il sait faire un usage toujours dialectique des documents qui ont été mis à sa disposition. Il en résulte un honnête travail qui, à plusieurs reprise, offre des points de vue intéressants et une ébauche d'analyse.
Bien entendu, ce livre n'est plus disponible depuis fort longtemps : il faut donc le consulter en bibliothèque.

 

Étude sur George Onslow.
par H. Luguet
(Mont-Louis, Clermont-Ferrand, 1889)

Professeur de philosophie à la faculté des Lettres de Clermont, Luguet a eu accès aux mêmes sources que Teillard (par la famille de Pierre), mais également à une autre collection privée : il ne les utilise pourtant pas de la même façon. Là où son prédécesseur avait mis en forme lettres, articles et citations, Luguet préfère, d'une part, disserter librement sur George Onslow, et, d'autre part, reproduire in extenso une longue liste de courriers extraits de la correspondance du compositeur. Quant à sa bibliographie, elle ne diffère pas de celle de Teillard et s'enrichit même du texte écrit par Marmontel et inclus dans son "Symphonistes et virtuoses". On trouve enfin dans cette brochure de 97 pages (dont seules 58 sont rédigées par l'auteur), le catalogue de l'œuvre d'Onslow tel qu'il est reproduit dans l'article de Fétis dans sa Biographie Universelle des Musiciens.
Plus littéraire dans le style et plus lyrique dans l'expression de ses sentiments, Luguet se révèle en revanche moins averti que Teillard lorsqu'il est question d'histoire et d'esthétique de la musique : son "étude" est pleine de lieux communs et comporte quelques erreurs d'appréciation. Son texte n'en demeure pas moins un portrait très attachant de George Onslow, tout en constituant un document précieux et de première main.
Là encore, on ne trouve plus cette publication que chez les bouquinistes et dans les fonds publics.

 

Étude sur la musique de chambre de George Onslow.
par C. Nobach
(Bärenreiter, Kassel, 1985)

Un siècle après Teillard et Luguet, et tandis qu'Onslow est tombé dans un oubli d'où seul Carl de Nys s'est efforcé de le faire sortir en se consacrant à la réalisation d'une dizaine d'enregistrements de ses œuvres (cf. Discographie), c'est une musicologue allemande, Christiana Nobach, qui entreprend d'écrire un ouvrage consacré à la partie la plus essentielle du catalogue onslowien : la musique de chambre. C'est donc par le biais de son œuvre qu'Onslow suscite à nouveau l'intérêt : à ce titre, l'étude de Christiana Nobach est exemplaire et demeure encore aujourd'hui une référence, même si l'on doit déplorer qu'elle n'ait jamais été traduite et qu'elle soit désormais indisponible chez son éditeur. On peut néanmoins la consulter en bibliothèque. L'analyse passionnante des différentes époques créatrices d'Onslow, la description de la façon dont son style a évolué, et l'ébauche d'une réflexion sur la réception de ses partitions en Allemagne constituent les points forts d'un ouvrage dont la lecture est très aisée. Cette étude est couronnée par un catalogue thématique des trios, quatuors, quintettes et autres pièces de musique de chambre d'Onslow qui est réalisé dans les règles de l'art.
Sur les 393 pages que compte cet ouvrage, une quarantaine est consacrée à la biographie du compositeur : Christiana Nobach connaît bien entendu Luguet, mais ne semble pas avoir lu Teillard. Ses sources sont enrichies par une riche bibliographie allemande (livres et presse) où elle a puisé de nombreux témoignages fort éclairants et inédits, ainsi que par un grand nombre de textes du 19e siècle : il en résulte le meilleur texte biographique sur Onslow à l'époque de sa rédaction.
On pouvait également apprécier quelques documents iconographiques bien choisis, en dépit de leur petit nombre.
Conformément à la ligne rédactionnelle de notre site qui privilégie le dialogue avec les spécialistes, nous vous proposons un petit entretien avec Christiana Nobach.

Le site George Onslow : Dans quelles circonstances avez-vous découvert George Onslow ?

Christiana Nobach : J'ai commencé à m'intéresser à Onslow durant mes études de musicologie à l'université de Göttingen. Je voulais écrire sur la musique de chambre inconnue : à la même époque, un de mes collègues réalisa un travail sur les quatuors et quintettes de Cherubini et, au fil de ses recherches, tomba par hasard sur les œuvres d'Onslow.

Le site G. O. : Pourquoi avez-vous décidé d'écrire un livre sur l'œuvre de ce compositeur inconnu ?

C. N. : J'ai entrepris d'écrire ma thèse en 1980 car il me tenait à cœur de rendre plus populaire la musique de chambre en particulier.

Le site G. O. : Avez-vous rencontré des difficultés pour le publier ?

C. N. : Non car j'avais des contacts avec les éditions Bärenreiter de Kassel.

Le site G. O. : Pourquoi Onslow demeure-t-il si oublié de nos jours ?

C. N. : Je ne pense pas qu'il soit si oublié en Allemagne : il est toujours au programme des concerts et des CD des jeunes ensembles allemands, et je ne comprends pas pourquoi les contacts en Allemagne et France sont si difficile à ce sujet.

Le site G. O. : Souhaitons que cette situation changera et nous nous y employons de notre mieux en proposant une version anglaise de notre site. Merci Christiana Nobach.

 

Nota bene : À la même époque où Christiana Nobach commençait à rédiger sa thèse, un Américain, Richard Frank, achevait un travail universitaire consacré à George Onslow : "George Onslow : A Study of His Life, Family and Works". Cette thèse fut publiée en 1981 par les Presses Universitaires du Texas à Austin. Cet écrit n'est hélas ni édité ni diffusé d'aucune façon. Néanmoins, c'est donc en Allemagne et aux États-Unis que la recherche onslowienne contemporaine a connu ses premiers essais au tout début des années 1980. Toujours aux États-Unis, on notera que Raymond Silvertrust, Président de l'International Cobbett Association for Chamber Music Research, a rédigé une étude des quatuors d'Onslow parue dans le journal d'information de son association entre 1997 et 2000 : il s'agit, une décennie après l'ouvrage de Christiana Nobach, de la deuxième étude importante consacrée à la musique de chambre d'Onslow.

 

Le compositeur Georges Onslow.
par G. Faivre†
(Santa Maria & Gazelle, Cannes, 1994)

Nous n'avons pas mentionné ce titre dans notre mot d'introduction car il ne relève pas directement de la littérature de recherche ; il n'en demeure pas moins un texte qu'il faut mentionner ici car il fut au 20e siècle (quoiqu'in extremis), le seul ouvrage paru en français sur George Onslow, ainsi que le rappelle fort opportunément Carl de Nys dans sa préface. Gérard Faivre n'était pas un musicologue, mais un authentique mélomane et un "poète" (C. de Nys) : sa lecture d'Onslow est plus intuitive que scolastique et, à ce titre, il apporte une contribution généreuse et sensible à cette bibliographie réduite. On y trouve néanmoins quelques documents intéressants, notamment en ce qui concerne l'accueil des symphonies d'Onslow en Allemagne.
Cet ouvrage n'est plus disponible.

Passionné par la figure de George Onslow, et pionnier de sa redécouverte en France aux côtés de Carl de Nys, Gérard Faivre prononça de nombreuses conférences pour mieux faire connaître ce musicien à ses compatriotes : l'une d'elles eut lieu le 30 novembre 1992 à la Société de Géographie Humaine de Paris et fut publiée dans la Revue Économique Française.

 

 

George Onslow : gentleman compositeur.
par V. Niaux
(P.U.F., Clermont-Ferrand, 2003)

Ce livre traite essentiellement de la carrière parisienne de George Onslow : il n'y est presque pas question de son implication importante dans la vie musicale clermontoise qui constitue pourtant un aspect très original de sa carrière, non plus que sur sa place dans le paysage musical anglais et allemand.
En dépit d'une édition de belle qualité, il manque surtout à cet ouvrage une vision personnelle et une lecture de la vie d'Onslow qui n'apparaît ici qu'à travers une description linéaire, ce qui ne permet pas d'avoir une approche synthétique des problématiques nombreuses du sujet. Certes le clivage bien connu à Paris de la musique instrumentale et du répertoire lyrique est très largement évoqué, mais ce n'est certes pas suffisant pour comprendre la spécificité de l'œuvre d'Onslow dans le paysage musical européen mais également provincial de la première moitié du XIXe siècle.
Le terme "biographie" n'est pas exact pour désigner cet ouvrage dans la mesure où des pans entiers de la vie de George Onslow ne sont tout simplement pas abordés : il aurait fallu faire valoir clairement cette approche spécifique, qui est intéressante en soi, mais qui ne permet cependant pas de présenter ce livre comme une biographie complète, ce qui a beaucoup été écrit par erreur dans la presse.

 

George Onslow.
par B. Jam
(Les Éditions du Mélophile, Clermont-Ferrand, 2003)

Il s'agit là de la première biographie complète de George Onslow (564 pages) : indéniablement la référence incontournable de cette bibliographie. Le Chamber Music Journal publié par la Cobbett Association a d'ailleurs décrit cet ouvrage comme "the definitive Onslow book" (Volume XVI n°1, printemps 2005).

Dans un style alerte où se mêlent polémique, analyse et réflexion, Baudime Jam (musicologue et musicien) réalise un travail exceptionnel de recherche qui l'a conduit à réunir, tant en France (Paris et Clermont-Ferrand), qu'en Allemagne et en Angleterre, une masse considérable de documents d'époque pour la plupart inédits. À travers un récit très bien construit et une utilisation toujours pertinente des archives qu'il a mises à jour, l'auteur nous raconte les origines d'Onslow, les conditions de son implantation en Auvergne, les péripéties de la Révolution qui l'ont conduit à l'exil avec son père, ses débuts à Paris et ses premiers succès "d'harmoniste", ses déboires à l'Opéra-Comique, son combat pour accéder à l'Institut, ses voyages en Allemagne et ses relations avec ses éditeurs, ses surprenants revers de popularité à Londres, ses efforts pour dynamiser le paysage musical clermontois, ses relations avec les artistes de son temps, sa personnalité paradoxale et polysémique, ses dernières années, etc. : rien n'est laissé de côté. À cela s'ajoute un tableau vivant et d'une grande richesse de la vie artistique de la première moitié du 19e siècle à travers sa presse sur laquelle Baudime Jam a réalisé un exceptionnel travail de dépouillement dont lui seront redevables bien des chercheurs qui puiseront dans son livre la matière de leurs propres écrits. Car l'étude que fait Baudime Jam de la critique musicale parisienne et de ses débats esthétiques dépasse de loin le seul contexte de cette biographie, tout en lui étant reliée de façon essentielle : ne se satisfaisant pas d'une simple compilation d'articles, Baudime Jam nous invite à découvrir le rôle que joua Onslow, parfois involontairement, dans les discussions esthétiques qui agitaient le milieu journalistique spécialisé : de l'art de traiter d'un sujet tout en ouvrant des perspectives sur d'autres.
Le vaste chapitre consacré à la carrière clermontoise d'Onslow est d'une exceptionnelle richesse : il offre l'occasion très rare de découvrir les conditions de la vie artistique d'une ville de province au début du 19e siècle. Les archives entièrement inédites utilisées par Baudime Jam représente une somme considérable de recherche dont il sait tirer le meilleur parti en restant toujours clair et dialectique. Il faut lire cette véritable étude de la vie musicale provinciale in situ pour se rendre compte de son importance dans la vie de George Onslow.
Quant au chapitre qui traite de l'Allemagne et de l'Angleterre, il ne nous apprend pas seulement de quelles façons contrastées l'œuvre d'Onslow fut accueillie dans ces deux pays, mais il nous donne beaucoup à comprendre quant aux habitudes culturelles des allemands et des anglais. On y découvre enfin les raisons complexes pour lesquelles Onslow ne connut pas la gloire dans le pays de ses ancêtres. Là encore, la masse d'archives réunies est étonnante : presse étrangère, ouvrages inconnus, correspondance, etc.
On peut également faire connaissance avec la vie privée d'Onslow à travers un grand luxe de documents qui nous révèlent un personnage à multiples facettes et d'une grande modernité : compositeur certes, mais également bon gestionnaire de ses intérêts éditoriaux et gentleman-farmer. Amoureux de la campagne auvergnate, Onslow vécut loin du microcosme parisien qu'il ne fréquentait qu'épisodiquement pour ses "affaires" : la découverte de son existence champêtre, dans ses moindres détails, et notamment son implication dans la vie quotidienne locale, est passionnante. Une fois encore, Baudime Jam a su dénicher des archives d'une grande rareté et qui n'avaient encore jamais été publiées : elles permettent de compléter sa biographie avec un chapitre essentiel qu'il ne fallait surtout pas ignorer car il permet d'illustrer les imbrications inévitables de l'homme et de l'œuvre. Les dernières années de la vie d'Onslow sont également très bien traitées.
Cette biographie est assez virtuose dans sa conception : elle met en perspective un grand nombre de problématiques en articulant avec aisance un nombre considérable de sources disparates que Baudime Jam met en relation et en écho sans jamais se départir d'un véritable sens critique et souvent polémique. Les anecdotes n'en sont pourtant pas absentes et, de façon fort agréables, elles émaillent cette somme imposante.
Jusque dans ses moindres aspects, cette biographie est de tout premier ordre et marquée du sceau de l'intelligence : ainsi les appendices sont-ils du plus haut intérêt, tout en évitant les écueils du genre. Loin de toute compilation, Baudime Jam sait retenir les informations qui suffisent à son propos, sans se perdre dans une exhaustivité inutile : son arbre généalogique ne remonte pas à Mathusalem et il nous épargne la liste des cousins germains et des frères par alliance ! Il sait également tirer un parti original de certains tableaux : ainsi sa liste thématique des dédicataires des œuvres d'Onslow est-elle une excellente invention ; non seulement il évite l'ennui d'une liste chronologique, mais il lui donne du sens en faisant apparaître des dominantes (les violonistes et les amateurs) et des minorités (les pianistes et la famille), sans parler du fait que chaque nom (ou presque) est accompagné d'une notice biographique aussi rare que précieuse. Son catalogue des œuvres, il est le plus complet jamais dressé et sa présentation est des plus exemplaires. L’annexe consacrée à la place du folklore auvergnat dans l’œuvre d’Onslow est charmante : on y découvre que le compositeur a réellement emprunté de véritables mélodies à la tradition locale. Quant aux trois textes de la famille Bardoux, ils permettent de refermer ce vaste ouvrage sur une note littéraire désuète qui ne manque pas de charme.
À cela s'ajoute une iconographie de tout premier ordre et qui recèle un grand nombre de documents inédits - notamment un Onslow baguette à la main et un beau portrait du compositeur au seuil de la vieillesse qui sont totalement inédits. Certains reprocheront à ce livre son apparence austère : elle est en raison inverse de la luxuriance de son contenu qui se lit agréablement et facilement, ce qui n'est pas toujours le cas dans les ouvrages d'érudition. La qualité de l'impression n'est cependant pas la meilleure qui soit.
On notera cependant les défaillances d'une édition qui n'a sans doute pas bénéficié de moyens à la hauteur de son contenu : on souhaiterait une présentation plus aérée, mais cela aurait sans doute contraint à publier ce livre en deux volumes, sans parler des coquilles nombreuses qu'une mauvaise relecture n'a pas corrigées et qui gênent parfois la lecture. Espérons pour son auteur que cette biographie aura les honneurs d'une seconde édition plus richement dotée en terme de budget afin d'améliorer cette présentation de qualité moyenne.
Nous ne nous attardons pas davantage sur cette biographie et invitons nos lecteurs à se reporter à l'interview que Baudime Jam nous a fait le plaisir de nous accorder (cf Interviews).

Nota bene : Baudime Jam a récemment contribué à un ouvrage collectif édité à l'occasion du centenaire de la mort d'Édouard Onslow, neveu du compositeur et peintre qui vécut à Blesle en Auvergne, en rédigeant l'article introductif intitulé "Les origines anglaises des Onslow d'Auvergne". Un site, que nous vous invitons à visiter, est consacré à Édouard Onslow par l'Association "Les Onslow d'Auvergne".

 

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